Maire-adjoint de Bayonne et belle plume, dans le récit cocasse qu’il fait de l’inauguration de la boutique de Bayonne, Yves Ugalde écrit, je cite, qu’il s’est dirigé vers cette nouvelle offre commerciale bayonnaise avec un rien de réticence, « ne serait-ce que parce que je craignais d’être reçu par quelque grand prêtre du monde d’après COVID, enfourchant toutes les montures du marketing végan et non carné des bobos écolos des grandes villes. De ces univers où le tube digestif se transforme progressivement en soliflore ». Son récit me réjouit parce que telle est bien la mission de Palais des Thés que de débarrasser le thé de ses divers clichés, et de guider chacun en fonction de ses goûts, à la façon d’un caviste, vers des thés faciles à apprécier, ou des crus plus rares. Et quel bonheur que de lire qu’il est tout prêt à se faire aujourd’hui une autre idée du camellia sinensis, d’autant que sur les terres de ce beau Pays-Basque, de très sérieuses tentatives existent à l’heure actuelle pour l’y faire pousser. Entre Nive et Adour, entre la Fête du Jambon et celle du Chocolat, à quand la Fête du Thé ?
Inspirations
Un train de vie
Darjeeling n’a pas le monopole du petit train et celui qui rallie Colombo à Badulla en dix heures serpente à maintes occasions entre les champs de thé, pour le bonheur des touristes comme des nombreux Sri Lankais qui empruntent cette ligne. Hélas, l’île connaît aujourd’hui de fortes turbulences à la fois économiques et politiques. Pourvu que ce pays d’une grande beauté et qui a connu la guerre durant plusieurs décennies se dirige résolument vers des jours meilleurs, pour le bonheur de ses habitants et des nombreux visiteurs.
Être utile
Lorsque j’achète certains thés, j’ai le sentiment profond de notre utilité à l’égard des communautés. J’ai le sentiment que l’argent versé en échange de ce travail remarquable que constitue la manufacture d’un grand cru va être réparti de façon équitable, et non pas profiter à un individu seulement. En visite dans une plantation, voici une question que je me pose souvent : mettons que je paye ici le thé le double de sa valeur, à qui va aller cet argent ? Dans certains cas j’ai l’intuition que l’argent ne va aller qu’à une personne ou bien une catégorie de personnes et que les cueilleuses, les cueilleurs ne toucheront pas le moindre bonus. Et lors d’autres visites, j’ai la conviction que mon geste donnera lieu à un partage. Que le village entier pourra se féliciter d’avoir su faire de si délicieux thés, et que tous les efforts seront mis en œuvre pour en manufacturer de nouveaux. Et dans ce cas, j’ai le sentiment, fort, de notre utilité. Ici, au Népal, les équipes de Palais des Thés et de la manufacture de Norling font connaissance. Vous êtes utile à tout le village lorsque vous leur achetez leur magnifique thé. (photo : Anna Galitzine)
Chez les Karen
Il n’y a pas qu’en Chine ou dans le nord du Vietnam que l’on récolte les feuilles de thés sur des camélias devenus hauts. Dans le nord de la Thaïlande, à quelques kilomètres du Myanmar (Birmanie), cette femme appartenant à l’ethnie Karen, prélève sur de vieux théiers qui s’épanouissent dans la jungle les jeunes pousses à partir desquelles va pouvoir être manufacturé le maocha, matériau végétal qui sert de base aux thés sombres.
Le voyage d’une vie
Inviter celles et ceux qui chaque jour contribuent à faire davantage connaître le thé, fait partie de ma mission. Parmi mes collaborateurs, ils sont nombreux à n’avoir encore jamais vu de théiers, et c’est à la fois une joie et la réponse à une exigence que de prendre avec eux la route des plantations. La semaine dernière, j’étais dans la vallée d’Ilam en compagnie de Anna, Cassandra, Svetlana, Clément, Pierre et Thomas. Nous avons été de petit producteur en petit producteur, nous avons découvert des gens extraordinaires, des paysages incroyables, ensemble, nous avons roulé les feuilles que nous avions nous-mêmes récoltées, rejoint par Léo, qui cherche à mes côtés les meilleurs thés du monde. Et nous nous sommes souhaité la bonne année puisque dans ce pays incroyable, nous venions d’entrer en 2079. Que de beaux moments, que de découvertes. Un voyage comme celui-là, dans des régions si inaccessibles, d’une certaine manière, c’est le voyage d’une vie, et rien ne peut me rendre plus heureux que ce partage, que de donner un peu à voir de ce métier merveilleux.
S’ouvrir à d’autres cultures
L’une des beautés et pas des moindres du métier de chercheur de thé consiste en la possibilité de s’ouvrir à d’autres cultures. Ici, lors de la fête de Tsechu, les moines donnent vie au personnage dont ils épousent le masque, le temps d’un défilé, sinon d’une danse.
Danses sacrées du Tibet
En route pour la vallée d’Ilam, je m’arrête à Katmandou. Matthieu Ricard m’a invité au monastère de Shechen à la célébration de Tsechu, une fête durant laquelle on peut assister à la représentation de danses sacrées tibétaines. A la veille du grand jour, les moines répètent. Demain, ils s’élanceront à nouveau mais cette fois après avoir endossé un lourd et fastueux costume ainsi qu’un masque impressionnant.
Une belle harmonie
Ici, à Taiwan, le sol à l’extérieur de la plus ancienne manufacture de thé noir, transformée en musée, m’évoque mon métier. Les pousses du camélia, végétales dans l’âme, et si on ne les récolte pas se transforment peu à peu en tiges, en bois. Ainsi le théier est-il fait de vert et de sombre, de matière souple et de matière dure, de feuilles et de branches. Ce contraste de couleurs m’évoque aussi les arômes du thé, arômes si souvent végétaux dans le cas des thés verts, et si boisés du côté des thés noirs. Tout ici dit le thé, jusque dans cette belle harmonie entre de vieilles planches entre lesquelles pousse une joyeuse herbe.
Des vœux d’équilibre
Le passage d’une année à une autre me rappelle le franchissement de ces ponts de singe que l’on trouve dans les régions montagneuses. Faits de cordes et de bambous, ou encore d’acier, parfois brinquebalants, parfois solides, ils ont en commun l’absence de piles et un certain balancement, une souplesse au niveau du tablier. L’équilibre est souvent précaire.
En ces temps troublés par un virus qui aura répandu la tempête, je nous souhaite une heureuse traversée, et formule le vœu que 2022 nous offre au niveau sanitaire un ciel éclairci. J’y ajoute un autre vœu, si important, que nous prenions enfin soin de notre belle planète et agissions en toute circonstance dans l’intérêt des générations à venir.
Nos amis producteurs
Lorsque je demande à Bente, qui signe les meilleurs thés de Tanzanie, en quoi Palais des Thés lui est utile, à elle et à sa communauté, la réponse fuse :
– Pour payer les salaires !
Et elle ajoute : …pour assurer la sécurité de la plantation, des salariés…Et pour la fierté, bien sûr !
– Merci pour votre support, complète Bente, et merci de nous aider à nous faire un nom dans le monde du thé. Quand vous venez avec vos équipes, vous me montrez ainsi qu’à tous ici que vous croyez en nous et que l’on peut compter sur vous !
À Bente, à nos amis producteurs, à nos clients, à nos équipes, je souhaite de très joyeuses Fêtes !